
A mon bras, à mes pieds, au-dessus de ma tête.
Comme un lac qui reflète un mont jusqu'à sa pointe
Je sens la profondeur où baigne l'altitude
Et suis intimidé par les astres du ciel.
Jules Supervielle
par Françoise Estèbe Réalisation : Nathalie Triandafyllidès
Vous êtes un grand constructeur de ponts dans l’espace, écrivit Rilke à Supervielle. Ponts entre deux cultures – l’Uruguay et la France, ponts entre le monde des vivants et le monde des morts, ponts entre le réel et l’irréel…Jules Supervielle disait de lui-même qu’il était « né sous les signes jumeaux du voyage et de la mort. » En 1884 Supervielle naît à Montévidéo, en Uruguay, de parents français. Cette même année, lors d’un voyage de sa famille en France, il perd ses parents à une semaine d’intervalle. Jules a huit mois. Il sera élevé en Uruguay par son oncle et sa tante qu’il croit être ses parents biologiques. A l’âge de neuf ans, le terrible secret de famille lui sera révélé de façon accidentelle et brutale. Il commence alors à copier des fables - le rêve et ses innombrables métamorphoses comme exorcisme de la réalité. La vie de Jules Supervielle sera rythmée par le va et vient de ses navigations entre la France et l’Uruguay, oscillation entre ses deux cultures. La mer, dit-il est son lieu. Il reconnaît avoir longtemps redouté la folie. Son travail poétique, qui sera salué par les plus grands noms de la littérature de son temps, sera un long cheminement pour s’éloigner des monstres obscurs tapis dans son inconscient. Les recueils « Débarcadères » 1922 et « Gravitations » 1925 marquent sa maturité poétique. Mais Supervielle est aussi l’auteur de romans, « L’homme de la pampa », « Le voleur d’enfants », « Le survivant », de textes fantastiques et loufoques, de fables, de contes : « L’enfant de la haute mer », perdu dans l’océan entre les vivants et les morts, si emblématique de l’identité mouvante de Supervielle. Il a également écrit des pièces de théatre, « La belle au bois », féerie en trois actes, « Robinson », « Schéhérazade », créée par Jean Vilar au Festival d’Avignon en 1948. Solitaire, silencieux, en marge des mouvements littéraires et des avant-garde, désireux de concilier modernité et classicisme, Jules Supervielle a manié tous les genres, tous les rythmes poétiques, dans « une exactitude hallucinée » et dans une quête perpétuelle d’abolition des frontières entre le réel et l’ailleurs. Et la voix de Jules Supervielle (archives INA Martine Auger)Textes lus par Bernard Gabay et Yasmine ModestineI - Ses recueils de poèmes :
Tous ces recueils sont disponibles dans la collection : Bibliothèque de la Pléiade, aux éditions Gallimard, Paris, 1996. J'ai précisé la date des premières éditions quand il y en avait.
- Débarcadères, Paris, Gallimard, 1922 et 1956, suivi de Gravitations, 1925
- Le Forçat innocent, Paris, Gallimard, 1930, suivi des Amis inconnus, 1934.
- La Fable du monde, Paris, Gallimard, 1938, suivi d'Oublieuse mémoire, 1949.
- 1939-1945, Bibliothèque de la Pléiade, 1946 et 1996, p. 405-469.
- A la nuit, Bibliothèque de la Pléiade, 1947, puis 1956 et 1996, p. 471-481.
- Naissances, suivi de En songeant à un art poétique, Bibliothèque de la Pléiade, 1951 et 1996, p. 539-567.
- L'Escalier, Bibliothèque de la Pléiade, 1956 et 1996, p. 569-589.
- Le Corps tragique, Bibliothèque de la Pléiade, 1959 et 1996, p. 591-654.
II - Ses contes et ses nouvelles :
- L'Enfant de la haute mer, Paris, Gallimard, 1931.
- L'Arche de Noé, Paris, Gallimard, 1938.
- Les B.B.V., Paris, éditions de Minuit, coll. "Nouvelles originales", n° 7, 1949.
- Premiers pas de l'univers, Paris, Gallimard, 1950.
III - Ses romans :
- L'Homme de la pampa, Paris, Gallimard, 1923 et 1951.
- Le Voleur d'enfants, Paris, Gallimard, 1926.
- Le Survivant, Paris, Gallimard, 1928.
- Le Jeune Homme du dimanche et des autres jours, Paris, Gallimard, 1952 et 1955.
IV - Ses pièces de théâtre :
- La Belle au bois, Paris, Gallimard, 1932 et 1947.
- Bolivar, Paris, Gallimard, 1936 et 1955.
- Robinson, Paris, Gallimard, 1948.
- Shéhérazade, Paris, Gallimard, 1949.
V - Son récit autobiographique :
Boire à la source, Confidences, Paris, Gallimard, 1933 et 1951.